L’une des figues emblématiques de la chanson kabyle, Chérif Kheddam, l’auteur de Elemri (le miroir), est décédé, aujourd’hui, 23 janvier 2012, dans un hôpital parisien. Il était âgé de 85 ans et il était dialysé depuis une quinzaine d’année.
Chérif Kheddam est l’un des monuments de l’histoire de la musique kabyle et algérienne. Il était auteur, compositeur et interprète. Il est est né le 1er janvier 1927 à Ath Bou Messaoud, un village situé à Ferhounène dans la wilaya de Tizi-Ouzou. Son père l’envoie d’abord à l’école française qui se trouve à 17 km de son village puis chez Cheikh Oubelkacem de la zaouïa de Boudjelil à Tazmalt dans la wilaya de Béjaia où il suivait des cours coraniques jusqu’en 1942. Il regagne Alger pour y travailler comme journalier à l’âge de 12 ans pendant trois ans puis part en France en 1947 et s’installe à Saint-Denis puis à Epinay. Il travaille dans une fonderie puis dans une entreprise de peinture de 1947 à 1961 en prenant en parallèle des cours de solfège. Il apprend les bases de la musique orientale avec Mohamed Jamoussi et développe sa technique musicale grâce aux cours du professeur Fernand Lamy.
Elemri (le miroir)
Il commence à jouer au sein d’une troupe de musiciens dans des cafés dès 1954 en tant que chanteur. Il enregistre sa première chanson « A Yellis N’tmurtiw » qu’il compose en 1955 qui connait un certain succès grâce la diffusion du disque par la Radio-Télévision Française (RTF) et signe un contrat avec la maison Pathé-Marconi EMI en 1956.
Chérif Kheddam enregistre durant l’année 1958 ses plus belles chansons comme Nadia, Djurdjura et Khir Ajellav n’Tmurtiw. Il chante la femme kabyle, l’exil, les montagnes de Djurdjura, l’indépendance et l’amour dans une poésie subtile et sensible tout en affirmant que pour lui la musique reste plus importante que les paroles. Il compose « Alemri », un bijou musical et poétique qui devient l’une de ses célèbres œuvres éternelles.
Il rentre en Algérie en 1963 et rejoint la radio Chaîne II où il anime plusieurs émissions notamment « Ighennayen Uzekka » dans laquelle il déniche les nouveaux talents de la chanson kabyle en les conseillant et encourageant dans le choix de leur voix artistique comme Lounis Aït Menguelet, Idir, Imazighen Imula et le groupe Yougourten. Il est derrière la création de la chorale du lycée Fatma-N’soumer et la célèbre chanteuse kabyle Malika Domrane fait partie de l’une des chorales lycéennes qui ont reprit cette idée.
Il a marqué la scène musicale algérienne en général et kabyle en particulier à travers un fabuleux patrimoine poétique et musical qu’il a laissé en plus d’avoir propulsé certains jeunes talents en stars de la chanson.
Un grand apport à la chanson kabyle
Le journaliste et musicologue, Nasreddine Baghdadi se souviendra de Chérif Kheddam, d’un grand Monsieur de la chanson kabyle : « Je connaissais le regretté Chérif Kheddam. Il a travaillé à la Radio nationale, à la chaîne II-d’expression kabyle-, dans les années 1970. Cherif Kheddam a été d’un très bon apport à la chanson kabyle. C’est lui qui a introduit la touche orientale et charqui dans la chanson kabyle. Et ce, en intégrant l’oûd (le luth) ainsi la direction classique et chorale. Il évoluait avec une formation classique avec une chorale. Une démarche singulière. On reconnaît tout de suite son style et sa musique parmi tant d’autres. C’était un chic type, un brave homme et un grand chanteur et musicien… ».